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Le blog de Jek (sculptures et nouvelles)

Glavia

Ca faisait maintenant plus de dix lunes que, dans cette région reculée du sud-est du Gramisk, la température ne dépassait plus les quinze groudures. Tout le monde circulait soit en pétrolateur soit en carolette et plus personne ne se risquait à sortir pieds-nus, c’était le moyen le plus sur pour contracter le Virolus et se choper en moins de deux cette sale maladie aux propriétés des plus sournoises.

Certes, on avait découvert un vaccin efficace, mais seules les Gramiskois aisés et bien pourvus pouvaient se permettre de s'offrir cet antidote sacré. A l'époque, et quelle époque, l'essence de sapin valait bien déjà cent Valox le vase, ce qui était une somme pour le quidam qui n'avait pas la chance d'avoir ses entrées dans une usine à employés.

 Violane se balançait, doucement, d’une manière rythmée et relaxante à souhait. Fixant entre deux clignements d'iris le portrait du Grand-Mamou qui était accroché juste en face d'elle et qui semblait prier les quelques Dieux locaux qui résistaient encore dans les esprits les moins vifs.

Pour une question d’économie, le thermostat du radiolateur était réglé au minimum, ce qui n'empêchait pas la douce chaleur d'origine nucléo-marine de s'infiltrer peu à peu en elle, cette délicieuse sensation de bien-être lui faisait oublier tout les soucis liés à cette ère évolutionnaire et à ses contraintes matérielles.

Soudain, alors qu’elle s’évadait paisiblement vers des astres bienveillants, la birzette se mit à retentir dans toute la baraque. Sa moelle épinière tressauta et elle dut redescendre la montagne de légèreté qu’elle venait de gravir comme une caillasse qui retombe après un jet voluptueux.

Elle prit le temps d'enfiler un peignoir en laine de bique et de regarder par le trou du judas que la visite était pacifique. C'était sa copinette de toujours, Glavia !

La belle fillasse qui était partie depuis si longtemps dans la région des dunes était de retour. Le palpitant de Violane était aux anges et notre héroïne aux cheveux de rouille fit rapidement sauter la loquette de la lourde porte opaque en bois des iles avec un plaisir non dissimulé.

-Avé fille de la montagne! lança la brunette vêtue d'un énorme manteau à pompons bleus. Elle se tenait sur la marche du haut face a elle, resplendissante comme dans ses plus proches souvenirs.

-Avé fille des dunes! répondit la rouquine - As-tu fais bon périple?

-Da, certes un peu frisquet, mais le bussaucar était bien chauffé. Je suis bien aise d'être enfin arrivée !

La brunette avait un grand chignon traversé d’une épingle en corne de buffle et portait sur l’épaule un sac en peau de Gargou de toute beauté !

-Waouh, tu es si belle ma Glavia ! Entre vite dans mon antre, tu te cailles les nibards là… que je suis bienheureuse te voir !

Glavia posa son joli sac sur le canapouf et s’étira de tous ses membres. Elle fut de suite attirée par cette étrange machine posée au milieu de la pièce.

- Oh, serait-ce un nouveau radiolateur????

La jeune fille s’approcha de la machine à chauffer l’échine. Elle était stupéfaite.

-Yo, je l'ai dégoté nikroum au Masterschop! Lui répondit dans un grand sourire la fillasse aux cheveux de rouille. Il était en promo, huit cent Valox. Avec tous les accessoires, c’était une affaire!

Glavia tournait autour de l’engin avec envie.

-Qu'est-ce qu'il est beau comme engin, j’en avais jamais vu d’aussi grand ! Je peux l'essayer?

-Bien sur ! Je savais qu'il te plairait. Donne-moi ton manteau, je vais le ranger dans la cintrerie.

La brunette au nez en trompette ne se fit pas prier et dégrafa à la hâte les boutons dorés de sa grosse parka, se soulagea de ses autres habits de voyageuse et ne mit pas plus d'une demi goutte d'horloge pour enfourcher la machine chauffante et d’y poser délicatement ses molletons de chair rosée.

-Comme on y est bien! S’esclaffât-elle. Je crois que je pourrai y rester des bulles entières!

Face à elle trônait le  portrait du Grand-Mamou et elle le trouva changé.

-Ca lui fait quel âge maintenant a ce berliquot ? demanda telle.

- Quatre vingt huit carrots. Mais rien que l'année dernière il en a déjà pris cinq! A cause de la crise.

- Ah, putasse, elle nous en aura fait baver la Guire!

- A qui le dis-tu ! Les étincelles de notre existence se font rares ma belle…

Après cet essai concluant et relaxant à souhait, Glavia enfila à son tour un peignoir en laine de bique puis alla s'assoir dans le canapouf aux cotés de son amie Violane.

Il faisait doux dans cette maisonnette, on s’y sentait comme une  dans une prairie de magnolias en fleur, l’ambiance était sereine et les deux fillasses dans leur peignoirs respectifs dégageait un bonheur sans pareil.

- Je crois que je vais me laisser tenter par une douchette, lança la plus petite des deux fillasses. J’ai l’impression d’avoir de la crasse dans les écoutilles avec ce périple.

- Yo, tu as raison ma beauté, je ne veux pas dire mais tu renifles le bison à la période du rut ! Elles se tapèrent une bonne rigolade en se tapant sur le bidon.

- Pendant ce temps, je vais nous préparer un bon sandwich aux œufs de piafs, tu m'en diras des nouvelles, c’est du frais, je les ai dégoté vite-fait-bien-fait a la métairie sur la route du Gloumack ! Tu t’en souviens de cette mine ou on allait jouer quand on était encore que des fillasses avec même pas un poil au pissou ??

- Un peu que j’ai de la mémoire pour ce genre de chose ! C’était trop top-top, qu’est-ce qu’on rigolait à cette période, on s’en foutait bien pas mal a l’époque que le Grand-Mamou nous matait les guibolles.

Elles se remirent encore une fois à se taper sur le bidon.

A l'extérieur, alors que toutes deux étaient occupées à leurs taches respectives, une éclaircie se profilait dans les langueurs Gramiskoise. La soirée serait, pour la première fois depuis bien longtemps idéale pour sortir sans avoir le moindre risque de contracter ce cornu de virolus. C’était bien-aise ça !

Lorsque Glavia sortie de la pièce d'eau, la faim au bide, elles s'attaquèrent cote à cote aux œufs de piafs que Violane avait délicatement  disposés sur un plateau entre deux bon gros morceau de gâteau aux fines herbes, le tout accompagné d'une bonne rasade de liqueur à la citronnelle.

- C'est de la liqueur que Coco m'a ramené de son périple aux îles jaunes! déclara fièrement Violane.

- Coco? Coco la gerbouille ?? Celui qui nous a fait tant rigoler a soirée ou il s’est enfilé 18 verres de liqueur de Jojoba ??

Elles se mirent toutes les deux à se retaper de bon cœur sur le bidon.

-Yo, Peut-être qu'on le verra ce soir, il fini son labeur avant la lune blanche, il passera certainement au Disco-rock juste après.

- Au quoi?

-Au Disco-rock. Tu sais bien, cette boite qui nettoie les tympans pour vingt Valox.

-Youpi, je me souviens maintenant. La dernière fois, un mecton avec un gros ceinturon m'avait dragouiller toute la soirée. Comment il s'appelait déjà?

-Groumu! Depuis il s'est uni de corps et d'esprit avec une fillasse du sud. Ils habitent à la sortie du tunnel.

-Eh bien, il n'a pas perdu de temps. Je l'ai échappé belle, un peu de plus et c'est moi qui passais le tablier.

A cette phrase, les deux fillasses se mirent à rigoler de plus belle en se tapant mutuellement sur les genoux puis Violane reprit la discussion.

- En parlant de ça, tu ne t'es toujours pas trouvé de mecton? Ce n’est pas ce qui manque à ce qu'il parait dans les dunes.

- Tu sais moi les mectons, une fois de temps à autres pour passer la nocturne, mais rien à faire, je préfère nettement les fillasses ! Peut-être que dans une dizaine de carrots je changerai d'avis et je me ferais faire un ou deux galiniots ...j’ai encore envie de jouer des guibolles sans avoir à laver les rideaux pour autant!

Elles se remirent à rigoler, puis tombèrent toute deux à la renverse sur le canapouf. Ca sentait bon la retrouvaille et le mélange de nibards.

Le ciel s'éclaircissait de plus en plus et cette fois c'était sur, on allait pouvoir sortir en toute tranquillité. Les guérisseurs allaient pouvoir fermer boutique pour laisser place aux armées de va-nu-pieds, aux mangeurs de soleil et au amoureux de cette nature si bellâtre en cette saison.

Au fond du canapouf la brunette sifflotait. Son peignoir entrouvert laissait apparaître une partie de sa poitrine imposante. Les mains derrière la tête, elle se mit à chantonner un air de chez elle. Même le Grand-Mamou semblait sourire béatement de la situation du haut de son portrait.

- j'espère que tu n'as pas oublié de prendre une belle robe, cria Violane du fond des gogues où elle était partie en trombe après avoir gobé 18 œufs de piafs et enfilé trois verres de liqueur.

- Bien sur que je n’ai pas oublié. J'en ai même pris deux, on ne sait jamais! Tu va voir ce que tu va voir ma copinette !

D'un bond, Glavia se leva puis alla rapidos chercher un gros sac d'où elle sortit en effet deux magnifiques robes du soir. Elle laissa glisser à ses pieds le peignoir, puis partit s'installer devant la mirabole pour les essayer.

- Qu'est ce qu’elles sont belles, dit Violane en passant la tête a travers l’entre-porte, tu pourrais peut-être m'en prêter une?

-Yo! Tu préfères laquelle des deux? La rougiole ou l'autre?

A son tour, Violane s'etait débarrassée de son habit de laine et commençait les essayages. Une fois déterminé qui porterait la rougiole et qui porterait l'autre, ce qui ne fut pas une mince affaire, elles se précipitèrent toutes les deux dans la pièce d'eau. C'était sur, elles seraient indéniablement les plus belles fillasses de la soirée.

Elles restèrent plus de deux bulles avant de ressortir, un chou-fleur sur la tête, les joues colorées comme un jour de carême et sentant le soleil sous les bras.

Les mectons n'allaient pas en revenir, elles allaient leur faire exploser le barbouillas force trois.

Face à face, elles se complimentaient l'une et l'autres :

- Tu va faire fondre les Krunes avec un décolleté pareil ! Y’a bien du monde au balcon, ça va faire sortir les joueurs de pipeau ça !

- Et toi t’as vraiment une paire de molletons à  faire sauter les braguettes ! Non mais t’as vu ton pétard dans cette robe ? Ce que tu es belle !

- tu es très belle aussi ma copinette…

Les mectons allaient pouvoir décranter leurs ceinturons! Elles s’enlacèrent longuement, mais il commençait à se faire tard. Il était grand temps de prendre le pétrolateur et zipper au disco-rock.

Certes, le pétrolateur était plus un véhicule de mecton, mais comme la carolette était en panne de carbu, c'était toujours mieux que d'y aller pieds-nus. Toutes deux prirent donc place dans l'engin pétaradant, puis partirent en direction du lieu de débauchage.

Lorsqu’elles arrivèrent en vu de la boite à son, plusieurs carolettes et pétrolateurs de tout style étaient garés devant la grande bâtisse. Deux gros malabars surveillaient les entrées et les sorties de ce bâtiment en forme de boudin. L'un des malabars avait, comme c'était la mode, un gros ceinturon autour du bidon et l'autre, qui sans aucun doute devait faire parti de la bande à Berk, portait un pantalon jaune cousu à l'élastore. Il y a longtemps que ce n’était plus à la mode dans ses contrées-ci, un has-been de première pensèrent-elles.

Ce soir là c'était gratuit pour les fillasses, ce qui arrangeait bien Violane qui en fin de secteur mensuel avait toujours du mal à décaner sa bourse. Glavia quand a elle et a son habitude n’avait pas l’ombre d’un Valox en poche.

Une fois entrées, les iris écarquillés elles se mirent en quête de chercher une éventuelle connaissance.

- Salut les fillasses! Lança un jeune mecton avec un blouzard de pétroleur. C'était Coco la gerbouille, accompagné d'un ami à lui.

- Je vous présente Robinet, c'est un grand voyageur. Il vient d'un pays qui n'est même pas inscrit sur nos cartes. Il ne parle pas bien Gramiskoi mais on arrive quand même à le comprendre.

- Robinet? Demanda Glavia. C'est un drôle de nom, si tu le permets je t'appellerai Robo, c'est quand même plus sympatoch!

- Ok fillette, répondit l'étranger. Moi, je t'appelle quand tu veux dit-il.

Ils se mirent tout les quatre à rigoler, puis allèrent s'assoir sur un canapouf en cuir de simili, un peu a l'abri des vibrations qui faisaient frémir les écoutilles.

Alors que Coco et Violane se chatouillaient l'égo un peu à l'écart, Glavia et Robo en étaient déjà à se raconter leurs périples respectifs, ils avaient l'air de s'entendre comme dans un conte de merveilles.

Une vingtaine de bulles plus tard et après plusieurs carafons de liqueur des îles, les deux couples décidèrent de quitter la boite à bruit pour rentrer tout les quatre à la baraque, histoire de déguster quelques gâteaux aux fines herbes en fumant des cigarettes qui font rire.

Vers trois bulles et demi c'est Coco qui un peu indigestionné alla se coucher le premier. Malgré la musique de fond on l’entendu tout de même gerbouiller au vomi-room.

Violane qui avait les pupilles en bulbe d’hérisson ne tarda pas non plus. Elle laissa l'idylle naissante du couple ami se terminer au fond du canapouf et rejoignit le pauvre coco qui devait avoir encore les babines imbibées de liqueur de Jojoba.

Au soleil levant, Violane fut la première à découvrir ses compagnons, les pieds dans le désordre sous la couvrante. A cette vue, elle souri puis se précipita dans la cuisine pour préparer un bon kawa.

Une fois réveillés, ils se retrouvèrent tous attablés devant une tasse de liquide fortifiant.

Glavia, se passant un doigt derrière l'oreille, profita de ce moment pour prendre la parole.

-         Mes chers amis, dit-elle. J'ai une grande nouvelle à vous annoncer. Robo m’a proposé de l’accompagner dans son périple vers ses contrées inconnues. Nous avons décidé de partir ensemble à la découverte de son pays qui est si loin. Avant la nuitée, nous seront partis, il faut six lunes pour aller là-bas ! Il parait que là-bas le soleil se lève plus tôt qu’ici, que les montagnes sont rougeoyantes et que les rivières sont si claires qu’on y voit les poiscailles se boulotter l’asticot !

- Yo, cria Violane en se dressant d'un bond les bracelets en l'air et les cheveux en pétard. Je suis hyper- joyeuse pour votre poire à tout les deux. Toi qui adore les périples, ma chère Glavia, tu vas être gâtée! Que je suis déçue aussi que tu ne reste pas plus de bulles avec moi…mais tu reviendras, j’en suis sure !

-         Bien sur ma belle amie ! Je reviendrais te voir bientôt !

Toute deux s’enlacèrent très fort. La brunette souffla discrètement quelques mots à l’oreille de sa copinette.

-Tu verrais ça, il a un turbulo de compet’ ce mecton, j’ai jamais vu un barboup comme ça ma filasse !

Elles se mirent à rire et a ses taper sur le bidon devant les deux mectons médusés. Coco qui comme tous les matins avait le chou-fleur dans l'gourou, ne donnait pas l'impression d'avoir bien compris l'importance de ce qui se passait dans cette habitation, Violane dut lui expliquer plus doucement pour qu’il comprenne ce qui se tramait dans la maisonnette. Il s'attrista un peu de perdre si rapidement un ami seulement rencontré la veille.

-Tant pis, dit-il, je suis quand même bien joyeux aussi pour votre poire. Que le Grand-Mamou veille sur vous mes amis. Puis il disparu gerbouiller le kawa.

A quinze bulles moins le quart, la larme à l'iris, Robo et la belle Glavia montaient le colimaçon du bussaucar en partance pour ce pays inconnu et fantastique, laissant derrière eux la grande fillasse à la chevelure de rouille et le mecton au blouzard de pétroleur.

Sur le perron de la baraque, ils décidèrent ce jour-là qu'il était peut-être grand temps pour eux de s'unir le corps et l'esprit.

Sur ce, dans les gaz du bussaucar qui pétaradait dans leur dos, ils rentrèrent les bras emmêlés fêter ça a leur manière. Ils n’apprirent que bien plus tard le tragique accident.

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